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Les parents d’élèves présentent leur application pour déclarer les cas de harcèlement
5 – 7 minutes
Par Audrey LETELLIER
De gauche à droite, Christophe Merlino, Nathalie Hass et Me Habib. L’an dernier, 405 cas de harcèlement ont été remontés dans l’Académie dont 70 % dans le département.
La Fédération des conseils de parents d’élèves du département (FCPE 13) lance son application. Elle permet, notamment, aux parents et aux ados de signaler un fait de harcèlement scolaire.
Rien n’était calculé mais c’est bien lors de la journée nationale dédiée au harcèlement scolaire, jeudi 9 novembre, que la Fédération de parents d’élèves des Bouches-du-Rhône, FCPE 13, a annoncé le lancement de son application sobrement appelée “FCPE 13”.
“Il s’agit de permettre de créer le lien entre tous les adhérents”, explique Christophe Merlino, le président de l’association qui a recueilli les voix de quelque 1,3 million de parents lors des élections du 13 octobre dernier.
L’application propose notamment un onglet permettant de déclarer des faits de harcèlement scolaire. “Nous avons lancé l’application hier (mercredi 8 novembre, Ndlr) et nous avons eu très rapidement les premières déclarations. Elles ont été traitées par l’académie Aix-Marseille et je peux vous dire que les familles ont été convoquées.”
En fonction du degré de gravité du signalement, la FCPE contacte l’établissement ou alerte directement la cellule harcèlement de l’académie.
Un outil supplémentaire
C’est que l’ambitieux projet Phare (Programme de lutte contre le harcèlement à l’école), du Gouvernement, n’a pas réellement été suivi d’effets : “C’est un dispositif, certes sérieux, relève Christophe Merlino, mais qui n’a pas été doté de moyens humains suffisants. C’est peut-être plus simple de cliquer et de rédiger.”
La FCPE n’entend, néanmoins, pas se substituer à Phare. “Nous voulons juste être un outil supplémentaire.” D’autant que le harcèlement ne se borne pas à l’école, les réseaux sociaux l’ont ramené à la maison. “Aujourd’hui, dans neuf dossiers sur 10, les réseaux sociaux sont en cause.”
Au lendemain de son lancement et sans communication, l’application a été téléchargée 570 fois et a enregistré plus de 13 000 vues. “Nous avons délibérément attendu la fin des élections de parents d’élèves, pour ne pas laisser penser qu’on se faisait de la pub sur la problématique du harcèlement.”
Des contributeurs, comme l’entreprise marseillaise RCTM et le restaurant Le Chianti, à Vitrolles, ont permis de financer cette application.
Aux parents, maintenant, d’inviter leurs enfants à télécharger, eux aussi, cette appli. Tous ne parlent pas ouvertement à leurs parents des faits dont ils peuvent être victimes au sein de leur établissement “mais cette appli pourrait permettre de libérer la parole.” C’est que le phénomène prend de l’ampleur.
“Le nombre de conseils de discipline explose, informe Christophe Merlino, et ça, c’est un signe. Ce n’est pourtant pas forcément la solution puisque le gamin changera juste de collège. Il faut pouvoir intervenir en amont. Il y aura toujours des moqueries ; ce qui importe, c’est l’impact que cela a sur l’élève.”
La FCPE 13 est présente dans une soixantaine de collèges sur les plus de 180 que compte le département. Quand il n’y a pas de liste FCPE à proprement parler, il y a toujours des adhérents en capacité de faire remonter d’éventuels problèmes.
L’application est téléchargeable par tous les parents, quelle que soit leur affiliation “mais seuls les adhérents ont accès aux espaces privés.” Sachez toutefois que si vous n’êtes pas adhérent de la FCPE et que vous déclarez un cas de harcèlement, il sera traité.
Le droit à la scolarisation se défend aussi en justice
L’application développée par l’entreprise Uacom pour la FCPE 13 comporte également un onglet dédié à l’inclusion scolaire. “Nous sommes la seule association de parents d’élèves à siéger à la Maison départementale des personnes handicapées”, souligne Nathalie Haas, référente.
L’application permet ainsi également aux parents de déclarer l’absence ou le manque d’accompagnants d’élèves en situation de handicap (AESH).
“Le nombre de demandes explose, relève Me Églantine Habib, avocate spécialisée. Dans certains cas, le manque d’heures d’accompagnement provoque la déscolarisation de l’enfant. Ce sont pourtant ceux qu’il faudrait protéger dans leur parcours scolaire car plus susceptibles d’être victimes de harcèlement. Ils représentent d’ailleurs un quart des dossiers. Des faits, paradoxalement, mis de côté car l’essentiel est d’abord de leur permettre d’accéder à une scolarité correcte.”
Des parents culpabilisent même d’avoir à réclamer ce droit à la scolarisation pour leur enfant et finissent par s’isoler. Il est pourtant possible de saisir la justice. “Lorsque les parents ont une notification de la MDPH, précise Me Habib, nous allons devant les tribunaux et la juridiction marseillaise est plutôt bienveillante.”
C’est que, bien souvent, une notification ne suffit pas. Les aménagements ne sont pas réalisés dans les établissements ou bien les candidatures aux postes d’AESH font défaut. “Il faut impérativement revaloriser ces métiers !”
Un collège vitrollais compte 200 Plan d’accompagnement personnalisé (PAP), sur un effectif de 700, alors nous sommes loin d’une situation marginale.